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Guy de Maupassant

Carta 418
A LA SEÑORA DE
GEORGES BIZET

(original en francés)

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 [Verano de 1886]

      Señora,
      Me llega su carta a Inglaterra1, luego de haber estado algún tiempo en no sé donde, tal vez en París, tal vez en Chatou, tal vez en Étretat, pues he vagabundeado mucho. Perdóneme pues el retraso en responderle. Mi voluntad no era esa en absoluto.
Voy, Señora, a enviarle un primer remedio contra la caída del cabello. Si no resulta enseguida, dígamelo y le indicaré otro sistema, pues los cabellos caen por dos motivos: en primer lugar, la parálisis del cuero cabelludo, debido a la naturaleza grasa de la piel; en segundo lugar, por exceso de lo contrario, es decir por la extrema sequedad de los cabellos.
      El primer caso es el más frecuente. Así pues, deberá lavar la raíz de los cabellos dos veces por semana con agua caliente donde habrá echado (algunos minutos antes del lavado) diez o quince gotas de amoniaco a fin de limpiarlo disolviendo bien el jabón. Usted deberá emplear para este lavado jabón de glicerina sin perfume, el de Rimmel es tal vez el mejor, después usted enjuagará y y friccionará la piel con la siguiente mezcla: en un vaso de agua tibia, verterá una cucharilla de café con coaltar* jabonoso de Leboeuf y Bayonne.
      El coaltar, que se encuentra en todas las buenas farmacias, debe tener la apariencia verdosa y lechosa, sin ningún depósito en el fondo de la botella.
      Si el líquido es ligero y se deposita, es demasiado viejo.
      Pero el inconveniente de este sistema es el de mojar mucho la cabeza, lo que es desagradable para las mujeres. Si esto no le va, le indicaré otro remedio que he visto funcionar a menudo, pero que yo no he empleado.
      Es necesario siempre limpiar la piel lo más posible y secarla completamente.
      No emplee ninguna pomada ni aceite, sino brillantina, sin aplicarla nunca sobre la piel, pues las sustancias grasas impiden el buen funcionamiento, y la vida de la epidermis.
      Espero, Señora, que me dará noticias de mis hermosos enfermos, cuya salud va a inquietarme; y si tengo el éxito que espero, pido (prometiéndole no hablar de ello nunca), pido, como precio de mis servicios, algunos de los que habré salvado.
Es muy audaz y muy inconveniente lo que hago, pero tanto peor.
      ¿Querrá usted recomendarme a sus amigas? Espero que la Señora de Richelieu me deba, como usted, muchos cabellos sanos. Estaré feliz de que sea así.
      Tomo las disposiciones necesarias para que sus cartas me lleguen más rápido, dirigiéndolas a Étretat (Seine-Inferieur), donde estaré algunos días.
      Como le decía al principio de esta carta, estoy en Inglaterra desde hace quince días, y he visto desfilar en la casa solariega de Rothschild una cantidad de personas ilustres, comenzando por el hijo del príncipe de Gales. Pero los hombres me interesan poco y ¡ las mujeres de aquí no tienen el toque de encanto de las nuestras ! quiero decir de las mujeres de Francia. Parece que lo único que tienen de severo son las apariencias. Ahora bien, cuando se mantienen las apariencias, y ese es mi caso, se tiene derecho a pedir más familiaridad. Pero imagino que se me ha adjudicado, antes de mi llegada, una reputación terrible, y que me encuentro en presencia de plazas en pie de guerra por temor a un ataque inmediato e imperioso de este francés libertino.
      Tengo pues los portes del muchachito que pretende ser prudente y que debe parecer muy tímido. Y se hablará, luego de mi partida, del pudor francés, como se habla en Francia, sin creerlo, del pudor inglés.
      Pasaré por París a comienzos de la semana próxima, donde espero ver a las amigas y amigos que hemos dejado allí. He recibido ayer una carta de la Condesa2 que debe aburrirse, pues la carta tiene dos páginas, lo que es un milagro para ella. Me pregunto si los Macabeos están muertos de viejos, o si los calores del verano les han afectado de parálisis, lo que no tendría nada de sorprendente3. Sería verdaderamente divertido verlos a todos no pudiendo decir más:
« auo-auo-auo. » ¿Qué se perdería ? ¿Qué se ganaría ? No opino. Va a decir usted que estoy celoso.
      He recibido también unas palabras de la Señora Kann, una auténtica nota, es decir tres líneas, sin ninguna novedad de su salud. ¿Sabe usted más que yo?
      Espero, Señora, que me dará noticias de la suya, ya que la cuido.
      Le beso las manos declarándome su respetuosos amigo y muy profundamente devoto, rogándole que presente mis respetos a la duquesa de Richelieu.

      GUY DE MAUPASSANT

1 Maupassant había sido invitado por  lord Rothschild.
2 Condesa Potocka.
3 Sobre la cena de los Macabeos, ver la carta a la condesa Potocka (N° 546).
* coaltar.- Alquitrán de hulla (N. del T.)

Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant


Mme GEORGES BIZET

[Été 1886.]

      Madame,
      C'est en Angleterre1 que votre lettre me parvient, après avoir séjourné je ne sais où, peut-être à Paris, peut-être à Chatou, peut-être à Étretat, car j'ai beaucoup vagabondé. Pardonnez-moi donc le retard que j'ai mis à vous répondre. Ma volonté n'y est pour rien.
      Je vais, Madame, vous envoyer une première méthode contre la chute des cheveux. Si elle ne réussit pas tout de suite, prévenez-moi et je vous indiquerai un autre système, car les cheveux tombent pour deux causes : premièrement, paralysie du cuir chevelu, provenant de la nature grasse de la peau ; deuxièmement, excès contraire, c'est-à-dire extrême sécheresse des cheveux.
      Le premier cas est le plus fréquent. Donc vous laverez la racine des cheveux deux fois par semaine avec de l'eau chaude où vous aurez jeté (quelques minutes avant de vous en servir) dix ou quinze gouttes d'ammoniaque afin de la rendre propre à bien dissoudre le savon. Vous emploierez pour ce lavage du savon de glycérine sans parfum, celui de Rimmel est peut-être le meilleur, puis vous rincerez et frictionnerez la peau avec le mélange suivant : dans un verre d'eau tiède, vous verserez une cuillerée à café de coaltar saponiné de Lebœuf et Bayonne.
      Le coaltar, que l'on trouve dans toutes les bonnes pharmacies, doit avoir l'apparence verdâtre et laiteuse, sans aucun dépôt au fond de la bouteille.
Si le liquide est léger et dépose, il est trop vieux.
     Mais l'inconvénient de ce système est de mouiller beaucoup la tête, ce qui est désagréable pour les femmes. S'il ne vous va point, je vous indiquerai un autre remède que j'ai vu réussir souvent, mais que je n'ai pas employé.
      Il faut toujours essuyer la peau le plus possible et la sécher complètement.
      N'employez aucune pommade ni huile, mais de la brillantine, sans jamais en mettre sur la peau, car les corps gras empêchent le fonctionnement, la vie de l'épiderme.
      J'espère, Madame, que vous me donnerez des nouvelles de mes beaux malades, dont la santé va m'inquiéter ; et si j'obtiens le succès que j'espère, je demande (en vous promettant de ne jamais en parler), je demande, comme prix de mes soins, quelques-uns de ceux que j'aurai sauvés.
     C'est très hardi et très inconvenant ce que je fais là, mais tant pis.
      Vous voudrez bien aussi me recommander à vos amies. J'espère que Mme de Richelieu me devra, comme vous, beaucoup de cheveux guéris. Je serais heureux qu'il en fût ainsi.
      Je prends des dispositions pour que vos lettres m'arrivent plus vite, en les adressant à Étretat (Seine-Inférieure), où je serai dans quelques jours.
      Comme je vous le disais en commençant cette lettre, je suis en Angleterre depuis quinze jours, et j'ai vu défiler dans le manoir Rothschild une quantité de gens illustres, à commencer par le fils du prince de Galles. Mais les hommes m'intéressent peu et les femmes d'ici n'ont point le charme des nôtres ! je veux dire des femmes de France. On prétend qu'elles n'ont de sévère que les apparences. Or, quand on s'en tient aux apparences, et c'est mon cas, on a le droit de les demander plus familières. Mais j'imagine un peu qu'on m'a fait, avant mon arrivée, une réputation terrible, et que je me trouve en présence de places armées en guerre par crainte d'une attaque immédiate et impérieuse de ce Français débauché.
      J'ai donc les allures de petit garçon qui tient à rester bien sage et qui doit sembler très timide. Et on parlera, après mon départ, de la pudeur française, comme on parle chez nous, sans y croire, de la pudeur anglaise.
      Je passerai par Paris au commencement de la semaine prochaine, où j'espère voir les amies et amis que nous y avons laissés. J'ai reçu hier une lettre de la Comtesse2 qui doit s'ennuyer, car la lettre a deux pages, ce qui est un miracle pour elle. Je me demande si les Macchabées sont morts de vieillesse, ou si les chaleurs de l'été les ont frappés de paralysie, ce qui n'aurait rien d'étonnant3. Ce serait vraiment amusant de les voir tous ne pouvant plus dire : « auo-auo-auo. » Y perdrait-on ? Y gagnerait-on ? Mais je me tais. Vous allez dire que je suis jaloux.
      J'ai reçu aussi un mot de Mme Kann, un vrai mot, c'est-à-dire trois lignes, sans aucune nouvelle de sa santé. En savez-vous plus que moi ?
      Je compte, Madame, que vous me donnerez des nouvelles de la vôtre, puisque je la soigne.
      Je vous baise les mains en me disant votre ami respectueux et très profondément dévoué et en vous priant de présenter mes hommages à la duchesse de Richelieu.

      GUY DE MAUPASSANT

1 Maupassant avait été invité par lord Rothschild.
2 Comtesse Potocka.
3 Sur le dîner des Macchabées, voir la lettre à la comtesse Potocka (N° 546).

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