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Guy de Maupassant

Carta 546 
A LA CONDESA POTOCKA
(Original en francés)

La condesa Potocka  Carta siguiente: 547 

        [Fragmento]

calle de Montchanin, 10
[1889]

      ... La he disgustado un poco. Perdóneme... Me esforzaré en no tener más esos prontos y de mostrarle siempre muy buen caracter. No haré, por otra parte, más que seguir el admirable ejemplo que usted me da desde hace algunos meses.
      He tenido unas ganas muy intensas de pedirle que me llevase esta tarde en barco. Habría encontrado un pretexto; y luego tuve miedo de molestarla. He pensado que mi lugar quizás estuviese ocupado, y aunque el papel de espectador desinteresado es el que  prefiero - casi siempre -, no he querido exponerme a romper la simetría de una fiesta. He visto a la señora Legrand y nos hemos decidido a cenar juntos cuando a usted le plazca, en París si usted quiere. Yo preferiría los campos pues no puedo ver París; pero prefiero también su deseo a los mismos campos. ¿Soy Florian? Cierto, tengo una necesidad inmoderada de hacer un viaje y maldigo las convenciones sociales que se oponen a mis ruegos de que me acompañe. Debe ser un sueño viajar con usted. No hablo del encanto de su persona que yo puedo degustar aquí, y del placer de mirarla que es también mayor en París que en otra parte, pero no sé de una mujer que pueda despertar como usted la idea del viaje ideal. Añado que si usted me dice sí, mañana, tal vez yo responda no; pues correría, trepando las costas de brezales con usted corriendo sobre dos playas de arena, un peligro tan vivo que la prudencia me aconsejaría evitarlo. No se trata aquí de galantería, sino usted no creería nada; y yo me resigno, lamentándolo.
      No pienso decididamente que pueda acompañar el sábado al cargamento de  Macabeos1 que descenderá el Sena con usted. ¿Entonces, cuando la veré? Voy al campo mañana y el viernes, pues en las calles me siento prisionero.
      Es cierto que me gustaría mucho ir a la Exposición2 con usted. Con usted sóla sería dificil, digamos con usted, su prima y primo. ¿Quiere cenar allí? ¡¡¿Estoy suavizado?!!
      Estoy a sus órdenes y le beso las manos. Ha sido muy gentil, y cuando yo tenga errores así perdonados, eso me enternecerá mucho.

      MAUPASSANT
      Ex.R.P.. ex-escritor, ex-navegante
      en este momento en representación en París.

1 La condesa Potocka había organizado la cena de los Macabeos, donde cada invitado se suponía haber perecido víctima del amor.
2. La Exposición de 1889.

 Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant


A LA COMTESSE POTOCKA

[Fragment]

10, rue de Montchanin
[1889.]

      ... Je vous ai un peu fâchée. Pardonnez-moi... Je m'efforcerai de n'avoir plus de ces évolutions et de vous montrer toujours un très bon caractère. Je ne ferai d'ailleurs que suivre l'admirable exemple que vous me donnez depuis quelques mois.
      J'ai eu une envie très vive de vous demander de m'enlever ce soir en bateau. J'aurais trouvé un prétexte ; et puis j'ai eu peur de vous gêner. J'ai pensé que ma place était peut-être occupée, et bien que le rôle de spectateur désintéressé soit celui que je préfère - presque toujours -, je n'ai pas voulu m'exposer à rompre la symétrie d'une fête. J'ai vu Mme Legrand et nous avons décidé de dîner ensemble quand il vous plairait, à Paris si vous voulez. Moi je préférerais les champs car je ne puis plus voir Paris ; mais je préfère aussi votre désir aux champs eux-mêmes. Suis-je Florian ? Vrai, j'ai un besoin immodéré de faire un voyage et je maudis les conventions sociales qui s'opposent à ce que je vous prie de m'accompagner. Ce doit être un rêve de voyager avec vous. Je ne parle pas du charme de votre personne que je peux goûter ici, et du plaisir de vous regarder qui est aussi grand à Paris qu'ailleurs, mais je ne sais pas une femme qui puisse éveiller comme vous l'idée de la voyageuse idéale. J'ajoute que si vous me disiez oui, demain, je vous répondrais peut-être non ; car je courrais, en grimpant les côtes de bruyères avec vous et en courant sur des plages de sable, un danger si vif que la prudence me conseillerait de l'éviter. Cela n'est point du marivaudage, mais vous n'en croirez rien ; et je m'y résigne, en le déplorant.
      Je ne pense pas décidément que je puisse accompagner samedi le chargement de Macchabées1 qui descendra la Seine avec vous. Alors quand vous verrai-je ? Je vais aux champs demain et vendredi, car dans les rues je me sens en prison.
      ... C'est vrai que cela ferait plaisir d'aller à l'Exposition2 avec vous. Avec vous seule serait difficile, disons avec vous, votre cousine et votre cousin. Voulez-vous y dîner ? Suis-je adouci ? !!
      Je suis à vos ordres et je baise vos mains. Vous avez été très gentille, et quand j'ai des torts ainsi pardonnés, cela m'attendrit beaucoup.

      MAUPASSANT
      Ex-R. P., ex-écrivain, ex-yachtmann
      en ce moment en représentation à Paris.

      1 La comtesse Potocka avait organisé le dîner des Macchabées, dont chaque convive était censé avoir péri victime de l'amour.
      2 L'Exposition de 1889.

Puesto en formato html por Thierry Selva:  http://maupassant.free.fr/