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Guy de Maupassant

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A HENRY CAZALIS
(original en francés)

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      Chalet del Mont-Blanc, Divonne
[finales de agosto o principios de septiembre de 1891.]

      Querido amigo,
      He recibido el admirable poema. ¡Bravo, bravo! Lo aprenderé de corazón dentro de algunos días como la sublime pieza de las mujeres condenadas. ¡Gracias por haberlo hecho y por habérmelo dedicado!
      No he recibido la loción. Tengo tales jaquecas aquí, jaquecas de las que estaba curado desde hace dos años, que tomo dos grajeas de antipirina al día. Me estoy volviendo idiota; no puedo escribir del todo.
      Estoy por tanto sumido en una inmensa preocupación. He hecho, como usted sabe, un viaje a París para consultar con Terrillon, Magitot, Lannelonge1 respecto de intolerables dolores en las mandíbulas con el ruego de que me dijeran si debía colocarme una anteojera localizada bajo el ojo enfermo. Pozzi, al contrario, quería que se pasara de mi encía esta podredumbre. Son opuestos en conjunto. He obedecido a estas autoridades. Acabo de ir a Ginebra y de ver al profesor de medicina dental de la facultad de esta ciudad.
      Me dijo sin vacilar: «Señor tiene usted en la boca, bajo un ojo enfermo, no solo un diente sino el tapón de un absceso. Vealo. Voy a quitárselo enseguida. Conozco sus historias de cocaina y participo de su horror por ese medicamento. Pero le ruego, le suplico que me deje vaporizar en un tubo de vidrio sobre su encía, veinte gotas de cloruro de metilo. Parecido un poco al éter. Eso es todo. Yo pongo cien gotas a todos mis enfermos. Vaporizo el líquido en mi mano agarrando el tubo de vidrio del que rompo el extremo. Ni una gota le tocará.»
      He aceptado para ver y me tapé la nariz pues me dijo que era más fuerte que el éter.
      Esto duró unos veinte segundo. Luego me dijo: « Respire » No había sentido nada. Me abrió la boca y riendo, sin apresurarse, tomo una pequeña pinza y quitó el diente tan rápido que ni me di cuenta. Éste salió, la raíz carcomida, podrida hasta el fondo, cubierta con unas especies de vegetaciones y de enormes pedazos de carne muerta en putrefacción. ¡¡¡Ah, los grandes cirujanos!!! Ya no tengo ni un solo dolor en la mandíbula hoy. La operación ha sido tan bien hecha que el agujero está casi cerrado ya. El ojo de encima me parece más claro aunque la inflamación total del maxilar envenenado por esta podredumbre no puede haber cesado en 24 horas.
      Pues bien, en este momento todo el mundo me dice: «Quede en Divonne». Y yo siento que con este clima, hago una tontería irreparable peor que Plombières donde Bouchard me ha mantenido a la fuerza.
      No puedo dormir, no puedo comer, arrastro mi jaqueca a lo largo de las rutas, penosamente, pues estamos en la montaña y no he podido nunca aproximarme. Esa es la historia de mi diente. Estoy dentro de mi piel, los demás no están allí. Comía como diez hombres llegando aquí, ahora mordisqueo como antaño, incapaz de caminar de lo mal que tengo el vientre, baldado de espíritu y de energía, más destrozado que nunca.
      Me hace falta el calor y el ejercicio y no puedo hacerlo, con el sentimiento de confusión en el que estoy sumido. Y luego ¿que tipo de ejercicio? ¿Caminar? ¿Ir a dónde? Ya he visto todo. No quiero empezar de nuevo. Mi inmovilidad me hace la ducha penosa, casi inútil. El cuerpo está fuerte; la cabeza más enferma que nunca. Hay días en los que tengo bruscamente ganas de meterme una balla dentro. No puedo leer; cualquier carta que escriba me produce un mal de vientre atroz y una hinchazón tal que tengo que desabotonarme todos mis trajes.
      Así fue en Plombières como lo padecí el año anterior.
      Quisiera la loción. Me estoy volviendo totalmente pálido y calvo...
      [Fórmula amistosa]

      GUY DE MAUPASSANT.

      ¡Dios! ¡Qué harto estoy de esta vida.!
      He tomado cuarenta duchas. Ellos me prescriben cien como mínimo; incluso ciento cincuenta. Me daré cincuenta en cinco días.

     1 Octave Terrillon, cirujano jefe de la Salpétrière; Magitot, estomatólogo reputado; Odilon-Marc Lannelongue (1840-1911), cirujano célebre, amigo de Gambetta, más tarde senador.- Más abajo Maupassant nombra a Pozzi (Samuel), cirujano eminente (1846-1918)

Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant


A HENRY CAZALIS

  Chalet du Mont-Blanc, Divonne
[fin août ou début septembre 1891.]

      Cher ami,
      J'ai reçu l'admirable poème. Bravo, bravo ! Je le saurai par cœur dans quelques jours comme la sublime pièce des femmes damnées. Merci de l'avoir fait et de me l'avoir dédié !
      Je n'ai pas reçu la lotion. J'ai de telles migraines ici, migraines dont j'étais guéri depuis deux ans, que je prends deux grammes d'antipyrine par jour. J'y deviens idiot ; je ne peux plus écrire du tout.
      Je suis pourtant délivré d'un immense souci. J'ai fait vous le savez, un voyage à Paris pour consulter Terrillon, Magitot, Lannelonge1 au sujet de douleurs intolérables dans les mâchoires avec prière de me dire si je devais faire arracher encore une œillère placée sous l'œil malade. Pozzi au contraire voulait absolument qu'on enlevât de ma gencive cette pourriture. Ils s'y sont opposés avec ensemble. J'ai obéi à ces autorités. Je viens d'aller à Genève et de voir le professeur de médecine dentaire à la faculté de cette ville.
     Il a dit sans une hésitation : « Monsieur vous avez là dans la bouche sous un œil malade, non pas une dent mais le bouchon d'un abcès. Vous allez voir. Je vais vous l'enlever tout de suite. Je connais vos histoires de cocaïne et je partage votre horreur pour ce médicament. Mais je vous prie je vous supplie de me laisser vaporiser dans un tube de verre sur votre gencive 20 gouttes de chlorure de méthyle. Ça sent un peu l'éther. Voilà tout. J'en mets cent gouttes à tous mes malades. Je vaporise le liquide dans ma main en tenant le tube de verre dont je casse le bout. Une goutte ne vous touchera pas. » J'acceptai pour voir et je me bouchai le nez car il me dit que cela sentait très fort l'éther.
      Ce fut l'affaire de 20 secondes. Puis il reprit : « Respirez ». Je n'avais rien senti. Il me détamponna la bouche et riant, sans se presser, prit une toute petite pince et enleva la dent si vite que je ne m'en aperçus pas. Elle sortit, la racine rongée, pourrie jusqu'au fond, couverte d'espèces de végétations et d'énormes lambeaux de chair morte en putréfactions. Ah les grands chirurgiens !!!! Je n'ai plus une seule douleur dans la mâchoire aujourd'hui. L'opération a été si bien faite que le trou est presque fermé déjà. L'œil au-dessus me semble plus clair bien que l'inflammation totale du maxillaire empoisonné par cette pourriture ne puisse être calmée en 24 heures.
      Et bien en ce moment tout le monde me crie : « Restez à Divonne ». Et moi je sens qu'avec ce climat, je fais une bêtise irréparable pire que Plombières ou Bouchard m'a maintenu de force.
      Je ne peux plus dormir, je ne peux plus manger, je traîne ma migraine le long des routes, péniblement, car nous sommes dans la montagne et je n'ai jamais pu en approcher. C'est absolument l'histoire de ma dent. Je suis dans ma peau, les autres n'y sont pas. Je mangeais comme dix hommes en arrivant ici, maintenant je grignote dégouté comme autrefois, incapable de marcher tant j'ai mal au ventre, perclus d'esprit et d'énergie, plus découragé que jamais.
      Il me faut de la chaleur et de l'exercice et je ne peux pas en faire, avec le sentiment d'accablement où je suis tombé. Et puis quel exercice. Marcher ? Aller où ? J'ai tout vu. Je ne recommence pas. Mon immobilité me rend la douche pénible, presque inutile. Le corps est fort ; la tête plus malade que jamais. Il y a des jours où j'ai rudement envie de me f... une balle dedans. Je ne peux pas lire ; toute lettre que j'écris me donne un mal de ventre atroce et un gonflement tel qu'il faut déboutonner tous mes vêtements.
      Voilà Plombières comme je l'ai senti l'an dernier.
      Je voudrais bien la lotion. Je deviens tout blanc et chauve...
      [Formule d'amitié]

     GUY DE MAUPASSANT

     Dieu que j'en ai assez de la vie.
     J'ai pris quarante douches. Ils en demandent cent au minimum ; même cent cinquante. J'en aurai cinquante dans cinq jours.

     1 Octave Terrillon, chirurgien-chef de la Salpétrière ; Magitot, stomatologiste réputé ; Odilon-Marc Lannelongue (1840-1911), chirurgien célèbre, ami de Gambetta, plus tard sénateur. - Plus bas, Maupassant nomme Pozzi (Samuel), chirurgien éminent (1846-1918).

Puesto en formato html por Thierry Selva:  http://maupassant.free.fr/