Carta anterior: 734

Guy de Maupassant

Carta 735
A LA SRTA. L. BOGDANOFF  
(original en francés)

 Carta Siguiente:736

Chalet de el Isère
Carretera de Grasse, Cannes,
[noviembre de 1891[

     Señorita,
     Veo que usted se enfadó mucho con  mi carta. De entrada, si la he ofendido, le pido todas mis excusas. ¿Qué razón tendría yo en el mundo para creer que usted no es una muchacha como Dios manda? Yo no sé nada de usted. He creído que usted era un joven que quería divertirse un poco a mi costa.
     En cuanto a mi fotografía, como permito exponerla y venderla, yo se la he enviado como hago con otras muchas personas que me son desconocidas, como usted. Confiese, en verdad, que es más bien un cumplido, habiéndome divertido su carta. Yo digo que no muestro nada de mi vida; desde el momento en que estoy en el mundo, y a donde tengo necesidad de ir, no oculta mi persona. ¿Por qué iba a ocultarla? Me reservo tanto como me es posible y permanezco en un solo medio con incursiones en otros. Es necesario ver y conocer.
     Esto no tenía nada personal. No he creído ni un segundo que usted vendría a mi encuentro, si nosotros nos encontrásemos jamás sería cara a cara. He pensado, al contrario, que usted quería intrigarme y no conocerme. Busco en ser muy claro acerca de todos los puntos para no tener apariencia de huraño. No lo soy en la vida. Creo incluso que nadie lo es menos que yo. Pero soy ante todo un observador. Lo que me divierte, lo examino. Lo que me parece insignificante, lo deshecho educadamente.         ¿Acaso no es esa una conducta muy normal y cortés?
     No se enfade entonces, Señorita. Le envío mis solícitos homenajes y si nunca nos encontramos, le pediré permiso para firmar con mi simple apellido, como se hace por un aficionado desconocido, esta nota que usted ha arrugado. Firmo muchos volúmenes de este modo, a toda petición, sin que se sepa la razón.

     GUY DE MAUPASSANT

Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant


A Mlle. L. BOGDANOFF

    Chalet de l'Isère,
Route de Grasse, Cannes,
[novembre 1891].

     Mademoiselle,
     Je vois que vous avez été fort irritée par ma lettre. D'abord si je vous ai blessée, je vous en fais toutes mes excuses. Quelle raison au monde aurais-je de croire que vous n'êtes pas une jeune fille comme il faut ? Je ne sais rien de vous. J'ai cru que vous étiez une jeune fille qui vouliez vous amuser un peu à mes dépens.
     Quant à ma photographie, comme je permets de l'exposer et de la vendre, je vous l'ai envoyée comme je fais à beaucoup d'autres personnes inconnues de moi, comme vous. Avouez, en vérité, que c'est là plutôt une politesse, votre lettre m'ayant amusé. Je dis que je ne montre rien de ma vie ; du moment que je vais dans le monde où j'ai besoin d'aller, je ne cache pas ma personne. Pourquoi la cacherais-je ? Je me garde autant que possible et je demeure dans un seul milieu avec des incursions en d'autres. Il faut tout voir et tout connaître.
      Cela n'avait rien de personnel. Je n'ai pas cru une seconde que vous viendriez à ma rencontre, si nous nous trouvions jamais en face l'un de l'autre. J'ai pensé au contraire que vous vouliez m'intriguer et ne vous pas faire connaître. Je cherche à être très clair sur tous les points pour n'avoir pas l'air bourru. Je ne le suis pas dans la vie. Je crois même que personne ne l'est moins que moi. Mais je suis avant tout un regardeur. Ce qui m'amuse, je l'examine. Ce qui me paraît insignifiant, je m'en écarte poliment. Est-ce pas là une conduite très normale et courtoise ?
      Ne soyez donc pas fâchée, Mademoiselle. Je vous envoie mes hommages empressés et si jamais nous nous rencontrons, je vous demanderai la permission de signer de mon simple nom, comme on fait pour un amateur inconnu, cette carte qui vous a froissée. Je signe beaucoup de volumes ainsi, à toute demande, sans qu'on sache pour qui.

      GUY DE MAUPASSANT

Puesto en formato html por Thierry Selva:  http://maupassant.free.fr/