ACTO PRIMERO

      Cuerpo de guardia de un palacete bretón en el siglo XIV. Grandes asientos de madera, mesas, diversas armas, despojos de animales, objetos de caza colgados en las paredes.
Puede percibirse la sala en perspectiva con unas ventanas al fondo. En primer plano, puertas a derecha e izquierda.


ESCENA PRIMERA

LUC DE KERLEVAN, YVES DE BOISROSÉ, JACQUES DE VALDEROSE, ÉTIENNE DE LOURNYE

Luc de Kerlevan, alto, delgado, de rasgos acentuados, juega a los dados con Yves de Boisrosé. Este último, grueso, está estrangulado en un uniforme y lleva a la boca a todo instante, un cántaro de vino que está sobre la mesa a su lado. Vasos en la mesa.
Étienne de Lournye, apoyado en la pared, los mira jugar; tiene unos dieciocho o diecinueve años.
Jacques de Valderose, de la misma edad, está solo de pie en medio de la sala y practica con una espada de combate.

 

JACQUES DE VALDEROSE
Kerlevan, viens ici ; nous allons faire assaut,
Je parie un baiser de ma mie.

LUC DE KERLEVAN, riant.
Ah ! bien sot
Qui s'y laisserait prendre ; où diable loge-t-elle ?
Tu l'as donc, si ce n'est qu'une pauvre mortelle,
Cachée en quelque puits, menée en quelque tour ?
Car je n'en sais pas une au pays alentour.

Boisrosé et Lournye se mettent à rire.

JACQUES DE VALDEROSE
Excepté toutefois notre belle maîtresse.

LUC DE KERLEVAN
Chut !... Elle est au-dessus et de notre tendresse
Et de notre pensée !

JACQUES DE VALDEROSE
Et Suzanne d'Églou,
Sa cousine ?

LUC DE KERLEVAN
As-tu donc le cou tellement long
Que tu veuilles le faire abattre avec la hache ?
Tais-toi.

JACQUES DE VALDEROSE, irrité.
Moi, je n'ai rien dans l'esprit que je cache,
J'ai le cœur assez grand pour aspirer à tout,
Assez haut pour ne rien craindre.

LUC DE KERLEVAN
Tu n'es qu'un fou.

JACQUES DE VALDEROSE
Allons, viens ; je parie un baiser de ma dame ;
Et si je perds, eh bien ! par le Christ et mon âme,
Je te paierai ma dette avant qu'il soit un an !

LUC DE KERLEVAN
Tiens, laisse-moi jouer.

JACQUES DE VALDEROSE
Ah ! tu crains, Kerlevan !

LUC DE KERLEVAN
Je crains que ta beauté soit vieille, borgne ou louche !

JACQUES DE VALDEROSE
Par le ciel, tu seras baisé de telle bouche
Que tu t'en vanteras le reste de tes jours !

LUC DE KERLEVAN
Toi, tu seras baisé par le bec des vautours !

JACQUES DE VALDEROSE
As-tu peur ? As-tu peur ?

LUC DE KERLEVAN, se levant.
Eh bien ! soit, mais prends garde,
Je te malmènerai, Jacques.

Boisrosé et Lournye s'approchent pour voir.

JACQUES DE VALDEROSE
Qu'on nous regarde.

YVES DE BOISROSÉ, riant en faisant danser son ventre.
Son épée est, ma foi, plus haute que son front.
Çà, lequel soutient l'autre ?

JACQUES DE VALDEROSE
Oh ! toi, l'homme tout rond,
Je te défie après.

YVES DE BOISROSÉ, riant.
Tu n'y tiendras plus guère !
Mon gros ventre est sorti sans trou de tant de guerres
Qu'on ne le crève pas.

Jacques de Valderose porte à Kerlevan plusieurs bottes sans pouvoir l'atteindre. Celui-ci, d'un revers de son épée, désarme le page et jette sa toque à dix mètres de lui, puis pose son arme tranquillement contre le mur.

YVES DE BOISROSÉ
C'est pour toi, cette fois ;
Kerlevan la veut jeune avec un frais minois.

ÉTIENNE DE LOURNYE, ramassant la toque de son camarade.
Il aurait pu du coup te fendre la cervelle.

 

 

JACQUES DE VALDEROSE
Kerlevan, ven aquí; vamos a a hacer un asalto,
Apuesto un beso de mi amiga.

LUC DE KERLEVAN, riendo.
¡Ah! que bobo
Quién se dejaría tentar; ¿ dónde diablos vive ella ?
¿ Si no es más que una pobre mortal, la tienes
Oculta en algún pozo, llevada allí en alguna ocasión ?
Pues no sé de ninguna en los alrededores de la región.

Boisrosé y Lournye se ponen a reir.

JACQUES DE VALDEROSE
Exceptuando siempre a nuestra bella amante.

LUC DE KERLEVAN
¡ Calla !... ¡ Ella está por encima de nuestro cariño
Y nuestro pensamiento !

JACQUES DE VALDEROSE
¿ Y Suzanne d'Églou,
Su prima ?

LUC DE KERLEVAN
¿ Tienes el cuello tan largo
Que deberías hacerlo abatir con el hacha ?
Cállate.

JACQUES DE VALDEROSE, irritado.
Yo, yo no tengo nada que ocultar,
Tengo el corazón bastante grande para aspirar a todo,
Bastante elevado para no temer nada.

LUC DE KERLEVAN
Tu no eres más que un loco.

JACQUES DE VALDEROSE
Vamos, ven; apuesto un beso de mi dama;
Y si pierdo, ¡ por Cristo y mi alma,
Te pagaré mi deuda antes de un año !

LUC DE KERLEVAN
Déjame jugar.

JACQUES DE VALDEROSE
¡ Ah! ¡ Tienes miedo, Kerlevan !

LUC DE KERLEVAN
¡ Temo que tu bella sea vieja, tuerta o fea !

JACQUES DE VALDEROSE
¡ Santo cielo, serás besado por una boca
que presumirás de ello el resto de tus días !

LUC DE KERLEVAN
¡ Y tú, serás besado por el pico de los buitres !

JACQUES DE VALDEROSE
¿ Tienes miedo ? ¿ Tienes miedo?

LUC DE KERLEVAN, levantándose.
¡ Está bien ! sea, pero ten cuidado,
Te pondré en apuros, Jacques.

Boisrosé y Lournye se aproximan para ver.

JACQUES DE VALDEROSE
Que se nos mire.

YVES DE BOISROSÉ, ríendo haciendo bailar su vientre.
A fe mía, que su espada es más alta que su frente.
¿ Esa, la que sostiene la otra ?

JACQUES DE VALDEROSE
¡ Oh ! A tí, el hombre bola,
Te desafío después.

YVES DE BOSROSÉ, riendo.
No tendrás ya mucho
Mi grueso vientre ha salido sin un agujero de tantas guerras
Que ya no se pincha.

Jacques de Valderose lanza a Kerlevan varios estocadas sin poder alcanzarle. Aquél, de un revés de su espada, desarma al pjae y arroja su estoque a diez metros de él, luego apoya tranquilamente su arma contra la pared.

YVES DE BOISROSÉ
Esa es para tí, esta vez;
Kerlevan la quiere joven con una dulce carita.

ÉTIENNE DE LOURNYE, recogiendo el estoque de su camarada.
Habría podido partirte el cráneo de un golpe.

ESCENA SEGUNDA

LOS MISMOS, más PIERRE DE KERSAC


PIERRE DE KERSAC, entrant vivement.

Messieurs, je vous apporte une triste nouvelle :
Le duc est prisonnier !

LUC DE KERLEVAN


Charles de Blois ?

PIERRE DE KERSAC


Montfort
L'emporte, et son soutien, l'Anglais, est le plus fort.
Il est maître partout, la Bretagne est sa proie :
Et Jeanne de Montfort, ravie en grande joie,
Jusqu'à la nuit venue, au seuil de son palais,
Sur la bouche baisa les chevaliers anglais !...

LUC DE KERLEVAN

Si l'Anglais règne ici, ce sera son ouvrage.

JACQUES DE VALDEROSE

Elle est brave du moins.

LUC DE KERLEVAN


Qu'importe le courage ?
Elle ouvrit la Bretagne aux Anglais.

JACQUES DE VALDEROSE


Mais les droits
Paraissent fort douteux entre Montfort et Blois.

LUC DE KERLEVAN

Mais Montfort c'est l'Anglais, Charles de Blois la France.

JACQUES DE VALDEROSE, à Kersac.

Tout est perdu ?

PIERRE DE KERSAC


Jamais on ne perd l'espérance !
Car Jeanne de Penthièvre appelle auprès de soi
Tout Français et Breton resté fidèle au Roi ;
Elle est fière et hardie autant que sa rivale.
Pour ceux qui n'ont point peur la fortune est égale.
Soyons les plus vaillants si les droits sont douteux.
Or, les chefs à présent sont partis tous les deux.
Blois prisonnier, Monfort tué par la Bastille.
La Bretagne est l'enjeu des femmes.

ÉTIENNE DE LOURNYE


On la pille,
On l'écrase, on la tue.

LUC DE KERLEVAN


Eh bien ! tant mieux pour nous,
Car je voudrais qu'on eût du sang jusqu'aux genoux !
Il laisse, ce sang-là, dans la terre inféconde
La haine des Anglais acharnée et profonde.

ÉTIENNE DE LOURNYE

Et nous ? Qu'allons-nous faire ?

LUC DE KERLEVAN


Espérons bien au moins
Ne pas rester ici d'inutiles témoins.

PIERRE DE KERSAC

Hélas, vous vous trompez, nous resterons encore
Comme garde laissée à la comtesse Isaure ;
Car le comte est parti tout à l'heure, emmenant
Tout son monde, soldat et gueux, noble et manant.
Ah ! le comte de Rhune est loyal et fidèle ;
Mais j'ai peur de sa femme, elle est fourbe.

JACQUES DE VALDEROSE


Et bien belle !

PIERRE DE KERSAC

On ne comprend jamais ce qu'elle a dans l'esprit,
Car son front est méchant quand sa bouche sourit.

JACQUES DE VALDEROSE

Elle a des yeux ainsi qu'on rêve ceux des anges.

HUGUES DE KERSAC

Mais on y voit passer des lumières étranges
Comme des feux d'Enfer.

JACQUES DE VALDEROSE


Elle est bien belle.

LUC DE KERLEVAN, sévèrement à Valderose.


Elle est
Notre maîtresse.

PIERRE DE KERSAC


Moi, je pense qu'elle hait
Quelqu'un obstinément.

JACQUES DE VALDEROSE


Ou peut-être qu'elle aime.

 
PIERRE DE KERSAC, entrando apresuradamente.
Caballeros, os traigo una triste noticia:
¡El duque está prisionero!

LUC DE KERLEVAN
¿Charles de Blois?

PIERRE DE KERSAC
Montfort
Lo lleva, y su sostén, el inglés, es el más fuerte.
Es amo de todo, la Bretaña es su presa:
Y Jeanne de Montfort, está encantada,
Hata la noche ha ido, al umbral de su palacio,
En la boca besa a los caballeros ingleses!

LUC DE KERLEVAN
Si el inglés reina aquí, eso será obra suya.

JACQUES DE VALDEROSE
Al menos ella es valiente

LUC DE KERLEVAN
¿Qué importa el valor?
Ella abrió la Bretaña a los ingleses.

JACQUES DE VALDEROSE
Pero los derechos
Parecen muy dudosos entre Montfort y Blois.

LUC DE KERLEVAN
Pero Montfort es inglés, Charles de Blois Francia.