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GRAN
HOTEL DE L'EUROPE
CRÉPEAUX MAYOR
LYON
Miércoles [21 de agosto de 1889]
Señora,
Acabo de pasar por una emoción atroz. El
pensamiento de mi hermano me atormentaba y he querido atenuar mi jaqueca con
cloroformo para ir a la residencia desde hoy. Lo he conseguido más o menos.
Había dejado a mi hermano en Cannes,
extravagante, poco razonable, violento, brutal, seguramente loco pero más
irritado que compasivo. Acabo de volver a encontrarme un miserable demente que
ha hecho cien leguas hacia la muerte, un miserable sumido en unas espantosas
crisis de angustia que siente sin comprender, un pobre ser gesticulante,
lloroso, que me ha estrechado en sus brazos durante dos horas preguntando por su
madre, su esposa y su hija, y repitiendo: «Mi pobre Guy, ¿recuerdas cuando era
pequeño?». Divaga, recuerda, olvida, pide auxilio, y me ha desgarrado el
corazón de tal modo que nunca he sufrido así1.
Cuando he debido partir y cuando se le ha impedido
acompañarme a la estación, se puso a gemir de un modo tan doloroso que no he
podido reprimir el llanto mirando a ese condenado a muerte que la naturaleza
mató, que no volverá a ver a su madre, y no hará más que percibirme, a mí,
dos o tres veces quizás. No es ya un hombre, es un niño que está solo, que no
comprende por qué, pide a los suyos, y siente que hay en él alguna cosa espantosa
e irreparable sin saber lo qué.
Quedo aquí mañana para verlo aún, se lo he
prometido.
¡Ah, el pobre cuerpo humano, el pobre espíritu,
que porquería, que horrible creación. Si yo creyese en el Dios de su
religión, que horror sin límites me produciría! Heme aquí en mi habitación
del hotel, tan herido que no he podido bajar a cenar.
Pero por que contarle esas lamentables cosas.
Quería enviarle desde aquí un abanico con
algunas líneas. No he encontrado más que uno, bastante mediocre pero antiguo y
plegado de forma que me permitiese escribir dos cuartillas que no tienen
demasiado sentido, pero hoy no tengo la cabeza clara. Nunca me he sentido tan
perdido como estoy en este momento, y veo ante mí tanto miedo, tantos dolores.
Si mi hermano muere antes que mi madre, creo que me volveré loco yo mismo
pensando en el sufrimiento de este ser. ¡Ah, la pobre mujer, ha sido aplastada,
molida y martirizada sin descanso desde su matrimonio.
Su despacho, que acaban de subirme, me ha sido un
consuelo, algo como una sonrisa, un apretón de mano, una simpatía muy dulce
que me ha hecho un bien infinito. Ha llegado tan justo que me ha parecido
remitido por un espíritu. He quedado tan sorprendido que al no haberle dado mi
dirección he creido en brujería. He comprendido al final que el número
de expedición había servido para encontrarme. Eso ha sido ingenioso, gentil y
delicado. Gracias, señora.
Quisiera saber si usted ha recibido mi abanico
del que estoy un poco avergonzado, en todos los aspectos. Si se lo pregunto es
por que no conozco la probidad comercial del vendedor que ha hecho el envío. En
medio de todas estas miserias de hoy, he pensado cien veces en esa breve cena de
ayer en el buffet de la estación. No había sentido nunca mi apego por usted
tan vivo y vibrante. No la había nunca sentido tan amistosa. ¿Es cierto? Ha
derribado mis prejuicios contra usted. (Eran únicamente contra su
sensibilidad). (y entiendo por sensibilidad la impresionabilidad afectiva de la
que yo dudaba un poco en usted.) esta frase tiene el aspecto de ser escrita por
Bourget. Tranquilícese que no está en Lyon, yo lo he imitado sin querer y mi
falta de claridad no es imputable más que a mí.
Escríbame tres palabras, señora, las tres
palabras que usted llega alguna vez a extender en cuatro páginas, o seis
palabras en ocho, lo que prefiero. De todos modos, como no pueden ser numerosas,
haga que sean enérgicas... y afectuosas.
Le beso las manos que no puedo tener ni tocar. Y
me gustaría que me ofreciese por cuarta vez... una mejilla, o dos.
Quedo a sus pies
MAUPASSANT2
1 El 11 de agosto de 1889, Hervé de Maupassant había sido internado en el
Hospital psiquiátrico de Bron.
2. El señor André Vial que ha publicado esta
carta en el Boletín del Bibliofilo, escribió al respecto: «El Gran Hotel de
l'Europe, que se encontraba en la calle Bellecour, a algunos pasos de la Saône,
ya no existe. Los archivos han sido perdidos o destruidos, y con ellos el
registro de los huéspedes, donde estaba consignado el de Maupassant. No sabría
decir si el miercoles 14 o el miércoles 21, más probablemente el 21, ya que el
escritor había dejado París por la costa e Italia, el martes 20. Es entonces
el martes 20 finalmente por la tarde cuando debió llegar a Lyon, en compañía
de la destinataria de este mensaje (la cual, sin duda, de detiene entre dos
trenes), y fue, imagino, en el buffet de la estación de Perrache donde tuve
lugar la comida y el carar a cara al que hace alusión. Fue finalmente el jueves
22 cuando debió volver a partir para el Midi. »
Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant
GRAND
HÔTEL DE L'EUROPE
CRÉPEAUX AINÉ
LYON
Mercredi [21 août 1889].
Madame,
Je viens de passer par une émotion atroce.
L'idée de mon frère me tourmentait et j'ai voulu endormir ma migraine avec du
chloroforme pour aller à l'asile dès aujourd'hui. J'ai réussi à peu près.
J'avais laissé mon frère à Cannes extravagant,
déraisonnable, violent, brutal, fou assurément mais plus irritant
qu'apitoyant. Je viens de retrouver un misérable dément qui a fait cent lieues
vers la mort, un misérable éperdu dans la crise épouvantable d'angoisse ou il
sent encore sans comprendre, un pauvre être grimaçant, pleurant, qui m'a
étreint dans ses bras pendant deux heures en demandant sa mère et sa femme et
sa fille, et en répétant : « Mon pauvre Guy te rappelles-tu quand j'étais
petit ». Il divague, se souvient, oublie, crie au secours, et il m'a déchiré
le cœur tellement que je n'ai jamais souffert ainsi1.
Quand j'ai dû partir et quand on lui a refusé
de le laisser m'accompagner à la gare il s'est mis à gémir d'une façon si
affreuse que je n'ai pu me retenir de pleurer en regardant ce condamné à mort
que la nature tue, qui ne reverra pas sa mère, et ne fera plus que
m'apercevoir, moi, deux ou trois fois peut-être. Ce n'est plus un homme c'est
un enfant qui est seul, qui ne comprend pas pourquoi, demande les siens, et sent
bien qu'il y a en lui quelque chose d'effroyable d'irréparable, sans savoir
quoi.
Je reste ici demain pour le voir encore, je le
lui ai promis.
Ah le pauvre corps humain, le pauvre esprit,
quelle saleté, quelle horrible création. Si je croyais au Dieu de vos
religions quelle horreur sans limites j'aurais pour lui ! Me voici dans ma
chambre d'hôtel, si meurtri que je n'ai pu descendre dîner.
Mais pourquoi vous raconter ces lamentables
choses.
Je voulais vous envoyer d'ici un éventail avec
quelques lignes. Je n'en ai trouvé qu'un, assez médiocre mais ancien et
doublé de façon à me permettre d'écrire deux quatrains qui n'ont guère de
sens, mais je n'ai pas la tête claire aujourd'hui. Jamais je ne me suis senti
perdu comme je le suis à cette heure, et je vois devant moi tant de chagrins,
de douleurs. Si mon frère meurt avant ma mère, je crois que je deviendrai fou
moi-même en songeant à la souffrance de cet être. Ah, la pauvre femme,
a-t-elle été écrasée broyée et martyrisée sans répit depuis son mariage.
Votre dépêche qu'on vient de me monter m'a
été un soulagement, quelque chose comme un sourire, une poignée de main,
plus, une sympathie très douce qui m'a fait un bien infini. Elle est arrivée
si juste qu'elle m'a semblé apportée par un esprit. J'ai été si surpris, ne
vous ayant pas donné mon adresse, que j'ai failli croire à de la sorcellerie.
J'ai compris enfin que le numéro d'expédition avait servi à me retrouver.
Cela est ingénieux, gentil et délicat. Merci, madame.
Voudrez-vous me dire si vous avez reçu mon
éventail dont je suis un peu honteux, à tous égards. Si je vous le demande
c'est que je ne connais pas la probité commerciale du marchand qui a fait
l'expédition. Au milieu de toutes mes misères d'aujourd'hui j'ai pensé cent
fois à ce petit dîner d'hier dans le buffet de la gare. Je n'avais jamais
senti mon attachement pour vous si vivant et vibrant. Je ne vous avais jamais
sentie si amicale. Est-ce vrai ? Vous faites tomber mes préjugés contre vous.
(Ils étaient seulement contre votre sensibilité). (et j'entends par
sensibilité l'impressionnabilité affective dont je doutais un peu chez vous.)
cette phrase a l'air écrite par Bourget. Rassurez-vous il n'est pas à Lyon, je
l'ai imité sans le vouloir et mon manque de clarté n'est imputable qu'à moi.
Voulez vous m'écrire trois mots, madame, les
trois mots que vous arrivez quelquefois à faire tenir dans quatre pages, ou six
mots dans huit, ce que je préfère. De toute façon, comme ils ne peuvent être
nombreux, faites qu'ils soient énergiques... et affectueux.
Je baise les mains que je ne peux plus tenir ni
masser. Et je voudrais bien que vous m'abandonnassiez pour la quatrième fois...
une joue, ou deux.
Je suis à vos pieds
MAUPASSANT2
1 Le 11 août 1889, Hervé de Maupassant avait été interné à l'Hôpital
psychiatrique de Bron.
2 M. André Vial qui a publié cette lettre dans
le Bulletin du Bibliophile, écrit à ce sujet : « Le Grand Hôtel de l'Europe,
qui se trouvait rue Bellecour, à quelques pas de la Saône, a cessé d'exister.
Les archives en ont été égarées ou détruites, et avec elles le registre des
passages, où était consigné celui de Maupassant. Il ne saurait s'agir
toutefois que du mercredi 14 ou du mercredi 21, et plus probablement du 21, le
romancier ayant, semble-t-il, quitté Paris pour la côte et l'Italie, le mardi
20. C'est donc le mardi 20 en fin d'après-midi qu'il dut arriver à Lyon, en
compagnie de la destinataire de ce message (laquelle, sans doute, s'y arrêta
entre deux trains), et c'est, j'imagine, au buffet de la gare de Perrache qu'il
prit le repas et eut l'exaltant tête-à-tête auxquels il est fait allusion.
C'est enfin le jeudi 22 qu'il dut repartir pour le Midi. »
Puesto en formato html por Thierry Selva: http://maupassant.free.fr/