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A
bordo del Bel-Ami (Cannes)
2 de febrero de 1888
Señor y querido colega,
¿No es asombroso que el mismo tema nos haya
tentado al mismo tiempo? Usted ha tenido la mala suerte de ver mi libro aparecer
antes que el suyo1, mientras que el uno y el otro estaban listos al
mismo tiempo. Es una fatalidad de la que usted es víctima, pero que no resta
ningún merito a su obra. Es indudable que usted ignoraba lo que yo escribía,
del mismo modo que yo desconocía lo que escribía usted, mientras que, lejos el
uno y el otro, sin conocernos, acabábamos su Stéphane y mi Pierre et
Jean.
Pero con la frecuencia de estas
coincidencias que se llamas plagios cuando no se puede tener la certidumbre,
como nosotros la tenemos hoy, de que los autores se ignoraban como
simultameamente ignoraban su trabajo, ¿no habrá una causa inapercibida,
inobservada y misteriosa? ¿Como se explica que a menudo dos hombres del mismo
oficio acaben en el mismo día la misma tarea, alumbrando dos libros tan
semejantes que parecen haberse comunicado sus pensamientos y sus temas?
¿Acaso no habran recibido, indudablemente, la
misma semilla de emoción? Fue una noticia de un periódico quién me ha dado la
primera idea de Pierre et Jean. ¿No puede ser que usted haya leído el mismo
hecho, el mismo día que yo? Cuantas veces también un suceso cualquiera
resonante, discutido, comentado, produce, en dos espíritus de la misma
naturaleza, la misma conmoción, luego la misma secuencia de razonamientos y de
deducciones, engrendrando un trabajo análogo que les conduce a las mismas
consecuencias lógicas.
Que uno de esos espíritus produzca más rápido,
por cualquier causa, la obra nacida de la misma semilla, se le acusará casi
fatalmente al otro de ser un plagiador.
Yo no puedo, Señor y querido colega, más que
lamentar el contratiempo que esto le produce. Me permito al mismo tiempo
felicitarle por ese primer libro que me atrevo a alabar puesto que se parece al
mío. En todo caso le deseo un gran éxito y le ruego que crea en mis más
devotos sentimientos.
GUY DE MAUPASSANT
1 En 1888 Edouard Estaunié preparaba su primera novela Un Simple, titulada al principio Stéphane, que tenía el mismo tema que Pierre et Jean. Maupassant, añade Clément-Janin (quién ha publicado la presente carta en Le Monde Nouveau del 15 de julio de 1924), habría consentido que esta carta sirviese de prólogo a Un Simple. Estaunié se contentó con dedicarle su novela, que apareció tres años más tarde.
Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant
Sur
le Bel-Ami (Cannes),
2 février 1888.
Monsieur et cher confrère,
Quoi d'étonnant à ce que le même sujet nous
ait tentés en même temps ? Vous avez eu la malchance de voir mon livre
paraître avant le vôtre1, alors que l'un et l'autre étaient prêts en même
temps. C'est là une fatalité dont vous êtes victime, mais qui n'enlève aucun
mérite à votre œuvre. Il est indubitable que vous ignoriez ce que j'écrivais,
comme j'ignorais moi-même ce que vous écriviez, alors que, loin l'un et
l'autre, sans nous connaître, nous achevions vous Stéphane et moi Pierre et
Jean.
Mais dans la fréquence de ces coïncidences
qu'on appelle des plagiats lorsqu'on ne peut avoir la certitude, comme nous
l'avons aujourd'hui, que les auteurs s'ignoraient comme ils ignoraient leur
travail simultané, n'y a-t-il pas une cause inaperçue, inobservée et
mystérieuse ? Comment se fait-il que souvent deux hommes du même métier
achèvent au même jour la même besogne, enfantent deux livres tellement
pareils qu'ils semblent s'être communiqué leurs pensées et leurs sujets ?
N'est-ce pas qu'ils ont reçu sans s'en douter le
même germe d'émotion ? C'est un fait divers de journal qui m'a donné la
première idée de Pierre et Jean. Ne se peut-il que vous ayez lu le même fait
divers, le même jour que moi ? Combien de fois aussi un événement quelconque
retentissant, discuté, commenté, produit, en deux esprits de même nature, la
même commotion, puis la même suite de raisonnements et de déductions,
engendre un travail analogue qui les mène aux mêmes conséquences logiques.
Que l'un de ces esprits produise plus vite, pour une cause quelconque, l'œuvre
née de la même graine, on accusera presque fatalement l'autre d'être un
plagiaire.
Je ne puis, Monsieur et cher confrère, que vous
plaindre de l'ennui qui vous arrive. Je me permets en même temps de vous
féliciter pour ce premier livre que j'ose louer puisqu'il ressemble au mien. Je
lui souhaite en tout cas un grand succès et je vous prie de croire à mes
sentiments très dévoués.
GUY DE MAUPASSANT
1 En 1888 Edouard Estaunié préparait son premier roman Un Simple, appelé d'abord Stéphane, qui se trouvait avoir le même sujet que Pierre et Jean. Maupassant, ajoute Clément-Janin (qui a publié la présente lettre dans Le Monde Nouveau du 15 juillet 1924), aurait consenti que cette lettre servît de préface à Un Simple. Estaunié se contenta de lui dédier son roman, qui parut trois ans plus tard.
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