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Guy de Maupassant

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A SU MADRE
(original en francés)

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      París, finales de abril o principio de mayo de 1891

      Mi querida madre,
      Estoy preocupado, pues para responder a tu carta, tengo un montón de cosas que decir, y me está prohibido escribir una línea. Todo esfuerzo con los ojos me deja enfermo hasta la noche. Es necesario que descansen absolutamente. Creo que mi paso por Niza les ha hecho un gran daño. Han estado mejor antes de mi regreso aquí, luego el horroroso tiempo que estamos pasando me ha producido una nueva recaída con esa divergencia de la vista que ya tuve, primero una vez en Cannes, escribiendo Bel Ami; segundo, el último año en Cannes, y finalmente en Niza este año.
      En cuanto al diente, el problema está resuelto, pero no estoy más que al borde de mis tormentos.
      El doctor Magitot, miembro de la Academia, es el que acaba de escribir, presentando en dicha Academia un informe violento y lleno de hechos de los que los periódicos han hablado ya de cocaina.
      Pone en conocimiento de sus colegas, tres o cuatro muertos por asfisia, treinta o cuarenta casos de envenenamiento durando de dos a seis meses por una simple inyección en la encía, con daños en el cuerpo entero.
      Este hombre es encantador y me conoce como si fuese mi pariente más allegado. Interés del lector por el escritor.
      Conoce toda mi vida como yo mismo, mi vida de remero, pues tiene una casa en Villennes y conoce mucho a Zola.
      Ha visto mi casa de Étretat, conoce mi existencia en París y, poseyendo un apeadero en Théoule, me ha visto a menudo en el Midi.
      Ha sido partidario de la extracción del otro diente, afirmando que no sufriré más cuando el agujero del primero esté cerrado. Mientras tanto el maxilar esté expuesto al aire, tendré trastornos de los ojos y de los senos que están siempre afectados de neuralgias. Está apresurando mucho en este momento la cicatrización de ese agujero con unos puntos de sutura mediante electricidad, y estoy seguro que me hará ganar al menos tres meses sobre el trabajo normal de la naturaleza.
      Ahora bien, anteayer, como no había podido ir a verle, vino a mi casa. Es un anciano, por supuesto.
      Me dijo: «Hablemos. Puesto que tengo la suerte de encontrarle, lo que deseo desde hace tiempo, es darle unos consejos de sabio, pues usted ha llevado una vida de trabajo que habría matado a diez hombres ordinarios. Hace tiempo que lo pienso y que quiero advertirle. Usted ha publicado 27 volúmenes en diez años, esa loca tarea ha devorado su cuerpo. El cuerpo se venga hoy y lo inmoviliza en su actividad cerebral. Le hace falta un largo descanso y muy completo, Señor. Le hablo como le hablaría a mi hijo. Lo que usted me ha contado acerca de sus proyectos no me dice nada bueno. ¿Que piensa hacer? Necesita de entrada abandonar París tan pronto yo haya acabado con su boca. No vuelva a Niza, es una ciudad enervante como ninguna otra, en verano, el puerto es un infierno, igualmente lo es el monte Boron.»
      Le he hablado de mi barco. Él me dijo:
      «Lo conozco. Lo encuentro muy bonito. Es un juguete encantador para un muchacho saludable que navega paseando a sus amigos, pero no es una habitación de reposo para un hombre fatigado de cuerpo y espíritu como usted.
      En los buenos días, supone la inmovilidad bajo el sol centelleante sobre un puente ardiente, al lado de una vela deslumbradora. En los demás días, es un inhabitable domicilio bajo la lluvia, en los pequeños puertos.
      Si fuese dos o tres veces más grande y confortable como una vivienda, yo le diría que fuese allí. O bien, si usted estuviese en un país sin casas, al borde del mar y poblado de árboles, y solo, le diría: Utilize todos los días ese barco, pero no viva en él sin otro domicilio. Me gustaría verlo muy aislado, en un país muy sano, no pensando en nada, no haciendo nada, y sobre todo  no tomando ningún medicamento de ninguna clase. Nada más que agua fría.»
      ¡Eso es todo!... En cuanto a mí, dudo completamente. No sé ya que hacer. Tengo ganas de navegar. Si eso no resulta, iré a los Pirineos que se me recomiendan mucho. Hablaremos de esto dentro de algunos días. En todo caso he hecho hacer para mi barco una tienda muy sólida cubriendo todo el puente que me asegurará dentro una residencia, pequeña, pero fresca, sea cual sea el sol en los puertos. En el mar, si marchamos durante días demasiado calurosos, quedaré en el interior como en un pequeño salón azul donde podré dormitar como en mi casa. En los pequeños puertos que me agraden, pasaré ocho días, paseandome sobre todo en los puertos de España, despues de una navegación bastante larga por la costa de Provence para estar bien informado.
      Esperaré a que el tiempo sea bueno para partir. Pasaré algunos días en Niza, luego saldré al mar, navegando mucho cerca de las costas.
      Hasta pronto, mi querida madre, te abrazo con todo mi carazón. Abrazo a Simone, mil saludos a mi cuñada.

      Tu hijo,
      GUY

Traducción de José M. Ramos González para http://www.iesxunqueira1.com/maupassant


A SA MÈRE

Paris, fin avril ou début mai 1891

      Ma bien chère mère,
      Je suis fort embarrassé, car pour répondre à ta lettre, j'ai un tas de choses à dire, et il m'est interdit d'écrire une ligne. Tout travail des yeux me rend malade jusqu'au soir. Il faut qu'ils se reposent absolument. Je crois que mon passage à Nice leur a fait le plus grand mal. Ils ont été mieux lors de mon retour ici, puis l'affreux temps que nous traversons m'a donné une nouvelle rechute avec cette divergence des regards que j'ai déjà eue, 1° une fois à Cannes, en écrivant Bel-Ami ; 2° l'année dernière à Cannes, et enfin à Nice cette année.
      Quant à la dent la question est résolue mais je ne suis pas au bout de mes tourments.
      Le docteur Magitot, membre de l'Académie, est celui qui vient d'écrire et va présenter à cette Académie un rapport violent et plein de faits dont les journaux ont déjà parlé sur la cocaïne.
      Il porte à la connaissance de ses confrères, trois ou quatre morts par asphyxie, trente ou quarante cas d'empoisonnement durant de deux à six mois par une simple piqûre à la gencive, avec troubles dans le corps entier.
      Cet homme est charmant et me connaît comme s'il était mon proche parent. Intérêt de lecteur pour l'écrivain.
      Il sait toute ma vie comme moi-même, ma vie de canotier, car il a une maison à Villennes et connaît beaucoup Zola.
      Il a vu ma maison d'Étretat, sait mon existence à Paris et, possédant un pied-à-terre à Théoule, m'a vu dans le Midi souvent.
      Il a défendu l'extraction de l'autre dent, affirmant que je n'en souffrirai plus quand le trou de la première serait fermé. Tant que le maxillaire sera exposé à l'air j'aurai des accidents de l'œil et des sinus qui sont toujours atteints de névralgies. Il hâte beaucoup en ce moment la fermeture de ce trou par des pointes de feu à l'électricité, et je suis sûr qu'il me fera gagner au moins trois mois sur le travail normal de la nature.
      Or, avant-hier, comme je n'avais pu aller le voir, il arrive chez moi. C'est un vieux bien entendu.
      Il me dit : « Allons causons. Puisque j'ai la chance de vous rencontrer, ce que je désire depuis longtemps, je vais vous donner des conseils de sage, car vous avez mené une vie de travail qui aurait tué dix hommes ordinaires. Il y a longtemps que je le pense et que je voulais vous prévenir. Vous avez publié 27 volumes en dix ans, ce labeur fou a mangé votre corps. Le corps se venge aujourd'hui et vous immobilise dans votre activité cérébrale. II vous faut un très long repos et complet, monsieur. Je vous parle comme je ferais à mon fils. Ce que vous m'avez raconté de vos projets ne me dit rien de bon. Que comptez-vous faire ? Il faut d'abord quitter Paris aussitôt que j'en aurai fini avec votre bouche. Ne retournez pas à Nice, c'est une ville énervante comme aucune autre, en été, le port est un enfer, le mont Boron également. »
      J'ai parlé de mon bateau. Il m'a dit :
      « Je le connais. Je le trouve très joli. C'est un charmant joujou, pour un garçon bien portant qui se promène en promenant des amis, mais ce n'est pas une habitation de repos pour un homme fatigué de corps et d'esprit comme vous.
      Par les beaux jours, c'est l'immobilité sous le soleil éclatant sur un pont brûlant, à côté d'une voile éblouissante. Par les autres jours, c'est une inhabitable demeure sous la pluie, dans les petits ports.
      Il serait deux ou trois fois plus grand et confortable comme un logis, je vous dirais allez-y. Ou bien, vous seriez dans un pays presque sans maisons, au bord de la mer et boisé, et seul, je vous dirais : Servez-vous tous les jours de ce bateau, mais ne vivez pas dessus sans autre domicile. Je vous voudrais très isolé, dans un pays très sain, ne pensant à rien, ne faisant rien, et surtout ne prenant aucun médicament d'aucune sorte. Rien que de l'eau froide. »
      Voilà !... Quant à moi, j'hésite tout à fait. Je ne sais plus que faire. J'ai envie pourtant d'essayer de la mer. Si cela ne réussit pas, j'irai dans les Pyrénées qu'on me recommande beaucoup. Nous causerons de ça dans quelques jours. En tous cas je fais faire pour mon bateau une tente très épaisse couvrant tout le pont qui m'assurera dedans un asile, petit, mais frais, quel que soit le soleil dans les ports. En mer, si nous marchons par des jours trop chauds, je resterai dans l'intérieur comme dans un petit salon bleu où je pourrai sommeiller comme chez moi. Dans les petits ports qui me plairaient, je passerais huit jours, en me promenant surtout dans les ports d'Espagne, après un essai assez long sur la côte de Provence pour être tout à fait renseigné.
      J'attendrai que le temps soit tout à fait beau pour partir. Je passerai quelques jours à Nice, puis je prendrai la mer, en excursionnant beaucoup à pied sur les côtes.
      A bientôt, ma bien chère mère, je t'embrasse de tout mon cœur. J'embrasse Simone, mille amitiés à ma belle-sœur.

      Ton fils,
      GUY

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